Déplacement du Président de la République à l’occasion de la 71ème Assemblée générale de Nations Unies [ja]

Le Président de la République s’est rendu à New York, le lundi 19 et le mardi 20 septembre à l’occasion de la 71ème Assemblée générale des Nations Unies.

Le Président de la République s’est rendu à New York, le lundi 19 et le mardi 20 septembre à l’occasion de la 71ème Assemblée générale des Nations Unies, en présence de M. Jean-Marc Ayrault, ministre des Affaires étrangères et du développement international, Mme Ségolène Royal, ministre de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer, chargée des relations internationales sur le climat, Présidente de la COP 21, M. Jean-Vincent Placé, secrétaire d’État chargé de la réforme de l’État et de la simplification, et M. André Vallini, secrétaire d’État chargé du Développement et de la Francophonie.

© Présidence de la République - F. Lafite
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Discours à l’occasion du sommet sur la crise des réfugiés (20.09.2016)


Discours à l'occasion du sommet sur la crise... par elysee

Texte du discours

New York, le 20 septembre 2016

Mesdames et Messieurs les chefs d’État et de gouvernement,

Monsieur le Secrétaire général des Nations Unies,

Mesdames, Messieurs,

Je veux d’abord remercier le Président Obama pour avoir pris cette initiative avec les deux co-présidents qui organisent ce sommet qui vient après la réunion du Secrétaire général Ban Ki-moon.

Les réfugiés, c’est la plus grave crise que rencontrent les Nations Unies depuis leur création. Il y a eu d’autres épreuves ces soixante-dix dernières années. Mais jamais il n’y avait eu autant de réfugiés dans autant de régions du monde. Parfois il s’agissait de répondre à un conflit, à un drame, à un dérèglement climatique, à une famine. Mais là, tout s’est conjugué pour faire de la crise des réfugiés une crise globale. Aucun continent n’est d’ailleurs à l’abri de cette question. Nous avons beaucoup parlé de l’Europe, parce les Européens parlent beaucoup de l’Europe et de leur continent. Mais en fait, la crise des réfugiés, elle concerne d’abord le Moyen-Orient et l’Afrique et je n’oublie pas l’Asie. Donc notre premier devoir c’est de mettre en place une aide multilatérale et pour chacun de nos pays des aides bilatérales à l’égard des régions ou des nations qui contribuent le plus à l’accueil des réfugiés. 

D’abord, au Moyen-Orient, trois pays subissent le choc de la guerre en Syrie et en Irak : la Jordanie, le Liban, la Turquie. Et ces pays accueillent plusieurs millions de réfugiés et depuis plusieurs années, avec une crainte, au-delà de l’hospitalité qui leur a été donnée : est-ce que ces réfugiés vont rester ? Ou est-ce que ces réfugiés vont à un moment, et sans doute le plus tôt sera le mieux pour eux, retourner dans leur propre pays ?

Mais quand une guerre dure, quand une crise perdure et que des réfugiés sont dans un pays depuis trois ans, quatre ans, c’est un fardeau et en même temps une épreuve pour ces pays qui ont à faire des arbitrages quotidiens pour assurer l’alimentation, mais aussi les services essentiels à cette population et avec les tensions qui peuvent exister à l’intérieur. Donc la France a considéré qu’elle devait multiplier son aide aux réfugiés. Et d’abord augmenter de 100 millions d’euros nos contributions auprès des agences des Nations Unies. Pour la période 2016-2018, au-delà de ce que nous faisons sur le plan multilatéral, nous allons déployer des dons, particulièrement au Liban avec notamment 50 millions d’euros qui seront destinés uniquement à la scolarisation des enfants réfugiés. En Jordanie, où l’agence française de développement va consacrer près d’un milliard de prêt pour que nous puissions fournir un certain nombre d’équipements qui seront utilisés pour les réfugiés mais aussi pour la Jordanie pour assurer son propre développement et avec une idée de faire travailler des réfugiés, car ils demandent eux aussi à être reconnus comme des travailleurs. Et nous faisons aussi avec la Turquie, dans le cadre européen, un soutien qui est indispensable si nous voulons que les réfugiés restent sur place.

Nous avons beaucoup parlé du Moyen Orient, mais il y a aussi l’Afrique qui est principalement concernée, et depuis longtemps, par la question des déplacés et réfugiés qui fuient leur pays à cause des guerres, à cause des conflits, à cause d’un certain nombre de régime, disons-le aussi franchement ; mais aussi parce que c’est l’espoir d’un avenir meilleur en Europe. Et la crise en Libye, le chaos qui s’y est installé favorise nécessairement les mobilités vers l’Europe.

Je veux insister sur la situation critique de la région du lac Tchad où, là encore, le terrorisme, celui provoqué par Boko Haram, a entrainé 2,5 millions de déplacés, 200 000 réfugiés, 5 millions de personnes dans l’insécurité alimentaire, dont 300 000 enfants. Là encore l’urgence est de pouvoir ouvrir des centres de santé, assurer des points d’eau, veiller à ce que des programmes d’éducation puisse être organisés. Là encore la France va mettre rapidement en place un nouvel instrument de financement à travers l’Agence française de développement pour agir en faveur du développement du lac Tchad.

Et puis il y a ce que nous devons faire, et ce sont des engagements qui ont été pris par beaucoup de pays ici représentés, pour accueillir nous-mêmes des réfugiés. C’est ce que fait la France au titre du droit d’asile. L’an dernier 20 000 personnes ont obtenu le statut de réfugié et il y a 10 000 Syriens qui ont été accueillis depuis le début de la crise.

Dans le cadre européen, et ça a été l’objet d’une discussion difficile, chacun le sait, nous nous sommes engagés à accueillir 30 000 réfugiés venant de Grèce, d’Italie et de Turquie d’ici décembre 2017 et nous poursuivrons les programmes de réinstallation que nous avons mis en œuvre avec le HCR au Liban et en Jordanie. Cet effort de réinstallation est, à mon sens, une bonne démarche et un bon exemple de ce qu’il est possible de faire. Puisque nous sommes sûrs des personnes que nous accueillons, nous pouvons vérifier leur parcours, connaître l’origine de leur drame et nous pouvons nous assurer préalablement qu’ils puissent disposer d’une formation, d’un encadrement et être accueillis dans de bonnes conditions dans nos propres pays.

Mais en même temps que nous devons assurer notre devoir humanitaire, faire prévaloir le droit d’asile, nous devons aussi contrôler nos frontières. Ce serait une incantation et même ce serait nourrir une illusion que de laisser penser que nous pouvons accueillir, accueillir sans cesse, non seulement des réfugiés, alors même que parfois il n’y a d’autre solution que de venir jusqu’à nous mais je parle des migrants. Nous devons tout faire pour que les frontières soient contrôlées et tout faire pour que ceux qui sont tentés par la migration puissent rester dans leur propre pays.

Mais une fois que j’ai dit ça, cela suppose que nous puissions d’une part régler les crises qui ont provoqué les déplacements. Je ne reviens pas ici sur la Syrie, sur ce qui se passe en Libye ou ce qui se passe aussi dans la région du lac Tchad. Lutter contre le terrorisme c’est finalement la première exigence que nous devrons avoir si nous voulons régler la question des réfugiés.

Mais nous devons aussi assurer le développement. Là-encore si nous voulons éviter les réfugiés demain, nous devons assurer le développement et la croissance dans les pays qui sont les plus pauvres et qui sont les plus vulnérables. Et si la France est autant engagée sur la question climatique, ce n’est pas simplement parce que c’est la planète qui est en cause et son avenir, et ce n’est pas simplement parce que le réchauffement provoquerait un certain nombre de dommages, y compris dans les pays que je représente ici. C’est parce qu’une des premières causes de déplacement, des migrations, des réfugiés, est une cause climatique. Et c’est pourquoi j’appelle une nouvelle fois à ce que l’Accord de Paris puisse être ratifié dans les meilleurs délais.

De la même façon, si nous voulons qu’il y ait une maitrise des flux migratoires, nous devons consacrer davantage d’investissements pour l’Afrique. Et ça a été l’objet de l’appel que j’ai lancé pour un plan de développement en Afrique, et notamment pour des énergies renouvelables. C’est ce que nous avons fait aussi cet après-midi pour mobiliser toutes nos forces et que les engagements pris à Paris pour permettre que tous les Africains puissent accéder à l’électricité trouvent enfin leur traduction. La présidente de la COP, Ségolène Royal, s’est mobilisée pour que nous puissions développer tous ces projets.

Voilà, Mesdames et Messieurs, il ne s’agit pas simplement de savoir qui va prendre la part du fardeau, qui va accepter de répartir des réfugiés tout au long des prochaines années, il s’agit d’organiser une véritable politique pour lutter contre les causes mêmes des mouvements de population, des déplacements. Il s’agit de régler les crises et d’assurer le développement. Il s’agit tout simplement de ne pas subir mais d’agir.

Merci.

Conférence de presse en marge de l’Assemblée générale des Nations Unies (20.09.2016)

Le président de la République, François Hollande, s’est exprimé devant la presse en marge de l’Assemblée générale des Nations Unies.


Conférence de presse en marge de l'Assemblée... par elysee

Texte de la conférence de presse

New York – Mardi 20 Septembre 2016

Le Président : Mesdames, Messieurs,

Je ne sais pas si vous avez pu entendre le discours que j’ai prononcé devant l’Assemblée générale donc je ne vais pas le reprendre ici. Pour la France, l’enjeu de cette Assemblée générale est la mise en œuvre de l’Accord de Paris parce que nous sommes engagés comme pays qui été capable d’obtenir la signature ; nous sommes engagés comme pays pour obtenir que la ratification puisse aboutir à la mise en œuvre effective de l’Accord de Paris au plus tard à la fin de l’année et de faire que la COP22 à Marrakech puisse être le lancement des initiatives que nous avons conclues lors de la conférence de Paris ; notamment le plan pour l’Afrique qui est - pour l’Europe et pour la France - une exigence, une priorité dès lors que nous pensons que cela peut avoir un rôle majeur pour le développement de l’Afrique : c’est la justice climatique et c’est une opportunité d’investissements considérable. Enfin, c’est une des voies, et sans doute la plus efficace, pour éviter, limiter, réduire et demain empêcher les migrations.

Nous avons aussi voulu que cette Assemblée générale porte sur le sujet de la Syrie, qui est maintenant une honte, une tache pour la communauté internationale. Accepter qu’il y ait une ville – aujourd’hui Alep mais il y en a d’autres - qui puisse être fermée avec une population affamée, avec des convois humanitaires attaqués, avec des armes chimiques utilisées et avec des enfants qui chaque jour sont victimes : c’est pour le monde entier une responsabilité.

Un accord, une trêve avait été trouvée. La France, par la voix de Jean-Marc Ayrault, l’a soutenue ; elle est aussitôt remise en cause. Quelle est la démarche ? C’est de revenir devant le Conseil de sécurité pour imposer cette trêve, faire en sorte qu’elle puisse être utilisée pour acheminer en toute sécurité l’aide et offrir une sortie possible de ce conflit par la négociation et par la transition politique.

Enfin j’irai jusqu’au bout, je l’avais affirmé en août 2013 –, la communauté internationale ne peut pas accepter que des armes chimiques aient pu être utilisées. Cela avait été suivi d’effet puisque des stocks ont été identifiés et détruits. Mais il en reste encore ! La preuve, c’est que des armes chimiques ont été utilisées après 2013. Donc, à partir de ce constat, de cette démarche, la France a voulu que l’Assemblée générale des Nations unies puisse faire la pression nécessaire pour que le Conseil de sécurité se tienne dans les meilleurs délais et prendre les décisions.

Je vais aussi - avec les ministres qui m’accompagnent et que je salue - être présent dans plusieurs manifestations, initiatives : celle sur les énergies renouvelables en Afrique avec Ségolène Royal, celle sur le gouvernement ouvert avec Jean-Vincent Placé ; nous allons assister aussi et prendre notre part avec Jean-Marc Ayrault à la réunion sur les réfugiés que Barack Obama a voulu organiser ici. Et puis il y aura une réunion très importante – c’est la France qui en est partie prenante avec les Émirats arabes unis - pour que nous puissions protéger les biens patrimoine de l’humanité avec un plan qui sera décidé et ensuite mis en œuvre lors d’une conférence qui se tiendra à Abu Dhabi. Mais d’ores et déjà, nous voulions mobiliser la communauté internationale sur cette initiative.

Voilà ce que je suis venu faire ici pour cette Assemblée générale des Nations unies. Ce n’est pas un discours de plus, ce n’est pas un rappel, comme je l’ai fait à d’autres occasions, de la politique étrangère de la France. C’est l’interpellation de la communauté internationale et notamment des pays membres permanents du Conseil de sécurité pour que nous puissions prendre des décisions et que s’engage un processus ; parce que le terrorisme – et j’en termine là – frappe tous les pays, il menace tous les pays. Nul ne peut penser qu’il en sera prémuni ou protégé, et veux exprimer mon soutien aux Américains après les agressions qui se sont produites il y a quelques jours.

La France a subi et déjoue chaque semaine un acte terroriste. Donc nous savons de quoi il s’agit. Avant de venir ici pour l’Assemblée générale, j’ai été invité par les associations victimes du terrorisme à prononcer une allocution où j’ai bien sûr exprimé ce que pouvait être notre solidarité mais également notre devoir de lutter contre les causes du terrorisme et contre les terroristes eux-mêmes. Or, nous savons bien où ces crimes terroristes sont organisés, où ils sont pensés. Et on sait bien maintenant par les moyens informatiques et notamment Internet combien est utilisé cet outil numérique pour parvenir à mobiliser des individus dans notre propre société, pour accomplir ces actes terroristes qui sont ensuite revendiqués par l’État islamique. Alors nous ne pouvons pas attendre. On ne peut pas penser que cela finira par cesser. Cela ne cessera pas tant que l’on n’a pas éradiqué Daesh en Syrie et en Irak et tant que l’on n’a pas pris des décisions pour sortir un certain nombre de pays du chaos – et il n’y a pas que la Syrie et l’Irak.

Je termine sur l’Irak parce que j’ai rencontré le Premier ministre irakien et parce que j’avais annoncé que la France prendrait des dispositions pour renforcer encore notre soutien, notre coopération et notre place dans la coalition par rapport à l’Irak et d’ailleurs aussi la Syrie. Aujourd’hui même, le groupe aéronaval, donc le Charles-de-Gaulle, a appareillé et se dirige vers la zone concernée. Aujourd’hui même, la batterie d’artillerie a été mise en place au nord de Mossoul et est prête à servir pour la reconquête de Mossoul. La France prend ses responsabilités dans tout domaine : la sécurité, puisque notre porte-avions est aujourd’hui sur le chemin de la zone et a appareillé, nos pièces d’artillerie sont disposées, nos avions interviennent. Nous prenons nos responsabilités sur le plan militaire mais cela ne suffira pas. Nous devons prendre aussi nos responsabilités sur le plan politique et c’était le sens de l’intervention que j’ai faite. Je peux répondre à vos questions.

Journaliste : Bonjour Monsieur le Président. Au nom de l’association des correspondants de presse UNCA, je vous souhaite la bienvenue et vous remercie pour cette conférence. Ma question, c’est au sujet des réfugiés, des migrants. Le débat général a surtout axé l’intérêt sur deux sommets : celui d’hier, le sommet sur les réfugiés et les migrants et celui de cet après-midi avec le président OBAMA qui a rameuté le monde, les dirigeants avec un sommet des dirigeants sur ce même sujet. Ce matin, vous avez rencontré le Premier ministre libanais, Tammam Salam, et lors de son discours, Tammam Salam avait lancé un plaidoyer dramatique en disant que son pays est en danger, le Liban est en danger. Que pouvez-vous faire, que peut faire la France pour nous soutenir davantage, pour nous apporter un appui, un soutien et une aide ?

Le Président : Vous savez, Madame, que j’étais au Liban il y a quelques mois ; le ministre des Affaires étrangères y était il y a quelques semaines et j’ai tenu à rencontrer le Premier ministre libanais en marge de l’Assemblée générale. Pourquoi ? Non pas simplement au nom de l’amitié historique entre le Liban et la France, mais parce que le Liban est un pays fragile, vulnérable dès lors qu’il accueille 1 million-1,5 million de réfugiés, dès lors qu’il porte ce fardeau et dès lors qu’il est entouré comme il l’est non pas par une menace, mais par une guerre à laquelle que le Liban fait face avec un courage exceptionnel.

Alors nous avons plusieurs décisions à prendre. La première, que le Groupe des amis du Liban puisse récolter le plus de fonds possible pour venir en soutien, comme d’ailleurs à l’égard de la Jordanie ou à l’égard de la Turquie, et de tous les pays qui accueillent des réfugiés. Ensuite, nous avons le devoir d’assurer la sécurité du Liban par le Liban lui-même. Vous savez combien j’ai voulu qu’il puisse y avoir la mise en œuvre d’un accord qui, pour l’instant, est suspendu. J’aurai également un rendez-vous avec le Président Rohani pour évoquer les sujets de la région mais aussi celui du Liban car l’Iran doit participer à la recherche d’une solution également pour la stabilité du Liban, notamment pour l’élection d’un président. J’ai eu également ce matin une rencontre avec le prince héritier d’Arabie saoudite et c’est le même argument que j’ai utilisé. Vous savez très bien que le Liban doit avoir une stabilité et il doit avoir une sécurité.

Je fais en sorte aussi, sur la question plus large des réfugiés, de ne pas simplement participer à des réunions. C’est notre devoir, nous le faisons : nous serons donc tout à l’heure avec le Président Obama. Mais la France prend sa part pour l’accueil des réfugiés de manière organisée, c’est-à-dire avec le respect des répartitions que nous avions fixées. Nous allons, dans les camps de réfugiés au Liban, en Irak, mais aussi en Turquie, comme nous pouvons le faire en Jordanie, pour accueillir des familles, nous faisons le plus gros effort sur ce plan-là de l’Union européenne et nous continuerons à le faire.

Journaliste : Monsieur le Président, vous avez eu des mots très forts sur la Syrie, vous avez évoqué les quatre exigences de la France, vous venez de dire qu’il ne s’agit pas d’un discours de plus, mais comment faire en sorte que ce ne soit pas simplement, malgré tout, une incantation ?

Le Président : Je ne reviendrai pas sur le passé récent et notamment sur ce qui aurait pu être fait à l’été 2013 mais qui, à mes yeux, a été le moment clé. Je ne reviendrai pas sur tous les cessez-le-feu qui ont été conclus et qui ont été ensuite dénoncés. Je veux simplement dire à ceux qui soutiennent le régime –et nous les connaissons, les Russes– que leur intérêt est d’aller vers la solution que je viens de proposer au nom de la France, c’est-à-dire que le Conseil de sécurité puisse être saisi rapidement et que le cessez-le-feu, sous la forme qui avait d’ailleurs été négociée entre Américains et Russes, puisse être proclamé et respecté. Pourquoi c’est leur intérêt ? Parce que le soutien jusqu’au bout du régime n’aboutira pas à la reconquête de la Syrie mais à sa partition, la séparation et au maintien de groupes terroristes.

De la même manière, pour les Américains, pour la coalition, l’intérêt est de bien faire la distinction entre des groupes qui représentent l’opposition syrienne. J’ai reçu ce matin le Président de la coalition de l’opposition syrienne. Il faut bien faire la distinction entre cette opposition et des groupes qui, on le sait –Al-Nosra ou ce qui a succédé à Al-Nosra–, sont des groupes qui ne sont pas si différents de l’État islamique. Il doit y avoir une négociation, elle est indispensable. Enfin, il y a un certain nombre de pays qui, là encore, sont soucieux du maintien des frontières, de l’indépendance. Et ces pays-là –ils se reconnaîtront– doivent également peser au sein du Conseil de sécurité pour qu’une solution soit trouvée.

Enfin ce n’est pas parce qu’il y a des élections aux États-Unis dans deux mois qu’il faudrait considérer que rien ne peut se faire dans le délai de deux mois. Il y a toujours des élections. Il est vrai qu’il s’agit de l’élection du Président des États-Unis, mais il n’y a pas de temps à perdre même si cela ne peut se faire dans le cadre de cette administration ; c’est d’ailleurs ce que Barack Obama a lui même rappelé. Voilà pourquoi la France considère qu’elle a un rôle particulier –elle parle à tous– et qu’elle peut, au-delà du discours, par son propre rôle, par sa propre responsabilité, y compris par son application –ce que je viens de dire sur l’Irak–convaincre que dans l’intérêt de tous, y compris dans la lutte contre le terrorisme, nous avons la possibilité d’avoir un accord et ensuite un processus.

Journaliste : Ma question, Monsieur le Président, est sur l’initiative française : est-ce qu’elle est morte, est-ce qu’elle est finie, l’initiative française, sur le Moyen-Orient, en particulier sur la question de la Palestine ? Merci.

Le Président : Elle n’est pas finie, elle commence puisqu’il y a eu une réunion au mois de juin qui s’est tenue à Paris. Jean-Marc Ayrault en a été la puissance invitante et le président. Et nous avons défini une méthode, des groupes de travail qui, d’ailleurs –on en fait l’évaluation à l’occasion de l’Assemblée générale–, poursuivent leurs activités de manière à ce que nous puissions avoir, au mois de décembre, une conférence qui puisse donner ses conclusions et être saisie par les parties prenantes : avec les Israéliens, les Palestiniens, parce que ce sont eux qui doivent négocier, personne ne négociera à leur place et personne ne leur imposera une solution, ce sont à eux.

Suite à cette initiative française, il y a eu d’autres initiatives qui, à un moment, se sont exprimées et nous avons dit : Mais tant mieux ! Et si cela peut aller plus vite que l’initiative française, nous ne nous sentirons pas blessés. Et s’il y a des rencontres qui peuvent se faire entre le Président de l’Autorité palestinienne et le Premier ministre Netanyahou, ce sera aussi une avancée. Nous ne refusons aucune autre proposition. Je sais que les pays arabes aussi ont fait des démarches, le Président égyptien, le Président russe, et également du côté des Américains, c’est très bien qu’il en soit ainsi. Mais pendant que toutes ces initiatives sont prises, la nôtre, si je puis dire, globale, continue et elle ira jusqu’à son terme.

Journaliste : Bonjour. J’ai une question sur la RDC. Ça fait plusieurs jours que le pays est secoué par des affrontements. Je voulais d’abord avoir votre sentiment sur ces violences et ensuite, savoir si vous attendez, aujourd’hui, l’annonce d’un scrutin, d’une date pour ce scrutin présidentiel très rapidement.

Le Président : Vous avez raison, il s’est produit des violences en République démocratique du Congo qui sont inadmissibles, qui sont insupportables. Nous ne savons pas encore le nombre de morts mais ce qui est incontestable, c’est qu’il y a des victimes et qu’elles ont été provoquées par des exactions venant de l’État congolais lui-même. Un parti, un parti d’opposition, le principal, a vu son siège agressé et même flamber, brûler. Dans aucun pays on ne peut accepter de tels comportements, de tels agissements ; je veux ici les dénoncer.

Je suis allé moi-même en RDC à l’occasion d’un sommet de la Francophonie. J’avais hésité à y aller mais je considérais que c’était mon devoir d’y aller parce que la France est un pays francophone et a vocation à aller partout, dans tous les sommets de la Francophonie. J’avais dit au Président Kabila que nous ne transigerions pas sur les élections, leur date et le processus constitutionnel. Après avoir dénoncé ces violences, ces exactions, la Constitution doit être respectée, des élections doivent se tenir. Ensuite, nous verrons avec le contrôle international ce qu’il sera possible de faire.

Discours devant l’Assemblée générale des Nations Unies (20.09.2016)

Le président de la République, François Hollande, a prononcé un discours devant l’Assemblée générale des Nations Unies.


Discours devant l’Assemblée générale des... par elysee

Texte du discours

New York, le 20 septembre 2016

Monsieur le Président,

Mesdames, Messieurs,

C’est toujours un honneur de s’exprimer devant l’Assemblée générale des Nations unies. Mais c’est aussi une responsabilité surtout devant l’état grave, inquiétant, que connait le monde.

Je suis devant vous au nom de la France pour lancer plusieurs appels : le premier, c’est de vous demander de tout faire pour mettre en œuvre l’accord historique qui a été signé à Paris le 12 décembre dernier. Cet accord était historique parce que la conférence se tenait alors même que la France, Paris, sa capitale, avait été frappée par des attentats terroristes. Cet accord était historique parce que pour la première fois, la communauté internationale rassemblée acceptait de s’engager pour réduire le réchauffement climatique et mobiliser des financements permettant aux pays les plus vulnérables d’assurer la transition énergétique.

Et pourtant devant vous je l’assure une fois encore, malgré le caractère majeur de cet accord, il n’y a pas de temps à perdre. Les deux années qui viennent de s’écouler sont les plus chaudes qu’a connu l’humanité depuis qu’on est capable de mesurer les températures. C’est vrai qu’en avril dernier, ici même, avec le secrétaire général Ban Ki-moon, un accord a été signé avec 175 pays. Mais chacun sait ici qu’il n’entrera en vigueur que s’il est ratifié par 55% des pays représentant 55% des émissions de gaz à effet de serre. Les États-Unis et la Chine ont annoncé leur décision de ratifier, c’était très important, et rien n’aurait été possible sans la participation, l’engagement, de ces deux pays qui sont les plus grands émetteurs de CO2. La France, elle-même, notifiera demain aux Nations Unies l’achèvement de sa procédure, mais j’appelle tous les pays qui sont membres des Nations unies à accélérer leur procédure de ratification pour que tout soit conclu d’ici la fin de l’année.

La COP 21 a été la conférence des décisions. La COP 22, qui se tiendra à Marrakech, doit être celle des solutions. Il s’agit de mettre en œuvre l’Alliance solaire internationale, de lutter contre la désertification, de protéger les océans, de fixer un prix du carbone. Mais l’appel que je veux lancer ici devant vous, à la suite de cet accord sur le climat, c’est un appel pour l’Afrique. L’Afrique est un continent plein de promesses, mais son développement peut être entravé par le dérèglement climatique, les migrations, les conflits, les guerres, le terrorisme. Ce continent plein d’avenir peut être aussi celui qui provoque une insécurité grandissante dont seraient d’ailleurs victimes d’abord les Africains. Je propose donc au nom de la France un agenda 2020 pour l’Afrique. Ce plan doit permettre à tous les Africains d’accéder à l’électricité. Deux tiers des Africains aujourd’hui en sont privés, c’est une injustice mais c’est surtout une entrave à la croissance durable de l’Afrique. L’enjeu, c’est donc de répondre aux besoins de 15% de la population mondiale. L’enjeu, c’est de permettre aux pays africains de bénéficier d’un potentiel immense de développement. L’enjeu, c’est de réduire les déplacements de populations, c’est-à-dire les migrations, qui déstabilisent à la fois les pays d’origine, mais aussi les pays d’accueil. J’ai donc lancé à Paris lors de cette conférence une initiative pour les énergies renouvelables en Afrique. Dix bailleurs, et je veux ici les en remercier, se sont engagés à verser 10 milliards de dollars d’ici 2020. La France en prendra à sa charge 20%, c’est-à-dire 2 milliards d’euros. L’Europe a décidé d’un plan d’action extérieure qui pourra atteindre, toujours dans cette même perspective d’accès des Africains à l’électricité, près de 40 milliards, qui peuvent être doublés si les États membres de l’Union y participent eux aussi. Mon appel est donc là encore à l’égard de tous les pays représentés ici un appel pour rejoindre cette dynamique. Ce n’est pas une solidarité que je sollicite, c’est un investissement mutuel qui sera bénéfique au monde entier que j’appelle ici à ce qu’il soit réalisé au plus vite.

Mais il n’y aura pas de développement de l’Afrique sans que sa sécurité soit garantie. La France, quand je l’ai engagée au Mali, avait conscience de sa responsabilité. Il fallait éviter que les organisations terroristes puissent prendre le contrôle d’un pays tout entier et déstabiliser une région entière. Aujourd’hui, cette menace a été endiguée. Le Mali retrouve son intégrité territoriale. Mais d’autres organisations apparaissent : Boko-Haram, Al Qaïda, et qui là encore mettent en cause la sécurité de nombreux pays de l’Afrique de l’Ouest, du Sahel, du Lac Tchad. Alors, là encore, la France est là pour appuyer les armées concernées pour les former, pour les entraîner, pour échanger de l’information, pour les soutenir dans le combat contre le terrorisme, c’est ce que nous faisons à l’égard du Nigéria, du Niger, du Tchad, du Bénin, du Cameroun, et nous devons encore amplifier cette action avec les Nations unies et avec l’Union africaine.

Mais que les choses soient bien claires. La sécurité des Africains doit venir des Africains eux-mêmes si nous voulons éviter les ingérences et les interférences extérieures. Et l’appel que je lance pour le développement, pour les énergies renouvelables, c’est aussi un appel pour la sécurité des Africains, pour que l’on puisse équiper leurs armées, leur donner les moyens d’agir, et qu’elles puissent, ces Nations africaines, organiser librement, souverainement, leur développement.

Le dernier appel que je veux lancer ici, et peut-être le plus pathétique, concerne la Syrie. Cette tragédie syrienne sera devant l’Histoire une honte pour la communauté internationale si nous n’y mettons pas fin rapidement. Alep est une ville aujourd’hui martyre qui restera dans la mémoire des Nations comme une ville martyre. Des milliers d’enfants sont écrasés sous les bombes. Des populations entières sont affamées. Des convois humanitaires sont attaqués. Des armes chimiques sont utilisées. Eh bien, je n’ai qu’un seul mot à dire : ça suffit. Comme en février dernier, le cessez-le-feu n’aura tenu que quelques jours. Il aura volé en éclats dès le lendemain de son annonce, sans que l’on n’en connaisse d’ailleurs le contenu. Le régime est responsable de son échec et il ne peut pas s’exonérer sur des erreurs qui auraient pu être commises par d’autres. Et je dis à ses soutiens étrangers que chacun connait ici, qu’ils doivent forcer la paix, sinon ils porteront avec le régime la responsabilité de la partition et du chaos en Syrie. Le Conseil de sécurité doit se réunir dans les meilleurs délais, et ne doit pas être un théâtre de dupe, c’est-à-dire un endroit où chacun se renvoie la responsabilité et où certains entravent le travail du Conseil de sécurité pour soi-disant protéger un régime alors même qu’ils doivent chercher avec nous une solution.

La France a quatre exigences. Imposer d’abord de cessez-le-feu, conformément aux décisions qui ont été prises. Ça, c’est le préalable. Ensuite, assurer l’acheminement immédiat de l’aide humanitaire à Alep et aux autres villes martyres. Ça, c’est l’urgence. Permettre la reprise des négociations politiques selon les principes de la transition qui avaient été établis déjà en 2012. Ça, c’est la solution. Enfin, sanctionner le recours aux armes chimiques. Ça, c’est la justice.

Si nous prenons à ce moment-là ces décisions, si nous agissons, il y aura une solution pour la Syrie. Mais il y aura plus qu’une solution pour la Syrie : il y aura enfin un espoir pour les déplacés et pour les réfugiés. Il y aura enfin une action qui permettra d’assurer à la Syrie de garder son intégrité territoriale. Il y aura aussi en Irak, parce que c’est notre volonté, une intervention qui permettra, celle-là, de pouvoir libérer l’ensemble de l’Irak par rapport à ce que Daech occupe aujourd’hui comme territoire. Il y aura enfin, si nous en décidons, une action qui pourra être efficace contre le terrorisme, et évitera que nous puissions connaître encore d’autres attentats partout dans le monde. Je l’ai dit, le risque c’est le chaos et la partition. Ce risque-là existe au-delà même de la Syrie, en Libye. Et l’urgence c’est de rétablir l’État autour du gouvernement de Saraj, c’est-à-dire le gouvernement d’union, c’est ce à quoi la France travaille avec ses partenaires et avec les Nations unies.

Mesdames et Messieurs, ne rien régler, laisser faire, laisser aller, c’est faire le jeu des forces qui veulent déstabiliser le monde, et notamment les terroristes. La France ne se résigne jamais, même si c’est difficile, surtout si c’est difficile. Et c’est pourquoi elle a pris l’initiative de contribuer à rechercher une solution au conflit israélo-palestinien. Certes, personne ne peut imposer aux partis une solution. Mais là encore se satisfaire du statu quo c’est prendre le risque, c’est laisser la colonisation une fois encore s’accomplir. C’est donner un fondement insupportable, injuste, inacceptable, à certaines actions de violence. Donc l’objectif c’est de réunir d’ici la fin de l’année une conférence pour qu’Israéliens et Palestiniens soient en capacité et en responsabilité de négocier.

C’est ce même esprit qui m’a animé avec la chancelière Merkel pour trouver une solution pour l’Ukraine. Ce fut l’invention de ce qu’on a appelé le format Normandie, qui a permis à Minsk de trouver un accord. Aujourd’hui, nous devons tout faire pour mettre en œuvre cet accord sinon il y aura de nouveau des violences, et peut-être même une guerre, qui reprendra. Je rappelle qu’elle a fait plus de 6000 victimes. Alors j’ai pris l’initiative avec la chancelière d’Allemagne de réunir les Présidents russes et ukrainiens dans les prochaines semaines pour avancer, pour mettre en œuvre les accords de Minsk. Nous n’abandonnerons pas cet objectif, nous ne renoncerons à aucune initiative si elle peut être utile.

Mesdames et Messieurs, j’ai évoqué le terrorisme. Il menace tous les pays du monde. La liste est longue d’ailleurs de tous ceux qui ont été frappés. En Afrique, au Moyen-Orient, en Asie, en Europe. Et je n’oublie pas même l’Océanie. Il n’y a aucun pays qui peut dire qu’il sera prémuni contre ce fléau : le terrorisme islamiste, le fondamentalisme, le fanatisme, qui s’est emparé d’individus perdus dans nos sociétés pour les radicaliser. Aucune mer, aucun mur, ne pourra protéger un pays de ce drame, de cette tragédie, de ce fléau qui s’appelle attentat, attaque, agression. Ce terrorisme prospère sur des conflits qui ont été ouverts et qui n’ont pas été réglés depuis trop longtemps. Il provoque une vague de réfugiés, il bouleverse la donne internationale, les frontières, que l’on croyait établies, le droit, que l’on pensait pouvoir faire respecter, la sécurité collective, qui était le principe même des Nations Unies. Face à ces périls, la France se tourne une fois encore vers les Nations Unies.

Elles ont montré leur efficacité avec l’adoption de l’Agenda 2030 sur le développement, l’accord de Paris, que beaucoup pensaient impossible. Les Nations Unies, qui engagent des opérations de maintien de la paix qui n’ont jamais été aussi nombreuses. Mais si nous voulons éradiquer le terrorisme, si nous voulons agir, il nous faut prendre des décisions, et pas simplement tenir le discours de la solidarité quand une attaque se porte contre un pays ami, ou la compassion à l’égard des victimes. Nous devons prendre des responsabilités chaque fois que c’est utile. C’est ce que fait la France, non pas parce qu’elle est attaquée. Je l’ai dit, tous les pays sont aujourd’hui la cible du terrorisme. Non, la France le fait parce qu’elle est membre permanent du Conseil de sécurité et que son rôle n’est pas de bloquer mais d’agir. La France le fait parce qu’elle a une idée, une grande idée pour le monde, celle qu’elle a toujours par son histoire portée, la liberté, la démocratie, la justice. Parce que la France met sa politique au service d’un but unique : la paix. Et parce que la France parle à toutes les parties prenantes. Parce que la France est une nation indépendante qui respecte le droit. Parce que la France n’a pas d’autres ennemis que les forces de la haine et de l’intolérance qui utilisent une religion trahie pour susciter la peur. Parce que nous devons lutter contre les populistes qui s’emparent du désarroi pour diviser, pour séparer, pour stigmatiser, pour opposer les religions les unes par rapport aux autres, aux risques d’un affrontement qui serait terrible pour la cohésion de nos sociétés. La France est un pays laïc, et qui se revendique comme tel, mais qui parle à toutes les religions et qui assure la liberté de culte en son sein, parce que la France n’a pas d’autre intérêt dans le monde que la stabilité, le développement, et l’avenir de la planète.

Voilà pourquoi la France est aussi attachée qu’elle le démontre chaque jour aux Nations Unies. Je veux saluer le Président de l’Assemblée générale, je veux saluer tous ceux qui se dévouent pour les Nations Unies et à commencer par le Secrétaire général Ban Ki-moon, qui depuis dix ans a mené cette mission difficile au nom de tous et qui a permis que nous puissions avancer. Et voilà pourquoi aussi j’attends des Nations Unies, et notamment du Conseil de sécurité face aux grands enjeux que j’ai évoqués et notamment celui de la Syrie et de la lutte contre le terrorisme, j’attends des Nations Unies qu’elles prennent leurs responsabilités. Il y a un moment pour toute génération, pour tout responsable public, la seule question qui vaille, c’est est-ce que nous avons pris des décisions ? Est-ce que nous avons pris les bonnes décisions ? Ici, il y a des pays de taille différente, de niveau de développement différent, de sensibilité, de conviction différente, mais qui doivent n’avoir qu’un seul but, qu’une seule exigence. Il faut que le monde soit au rendez-vous des enjeux de la planète.

C’est pourquoi j’ai voulu lancer ces appels. Appels pour que nous puissions mettre en œuvre l’accord de Paris sur le climat. Appel pour l’Afrique, pour que tous les Africains puissent disposer de l’électricité et d’un niveau de développement. Appel pour la paix en Syrie parce qu’il y a urgence. Voilà pourquoi je crois aux Nations Unies et voilà pourquoi aussi je porte avec la France un message universel.

Merci.

Discours lors de la cérémonie de remise du prix "Homme d’État de l’année" (19.09.2016)

Le président François Hollande s’est exprimé après avoir reçu le prix "Homme d’Etat de l’année" décerné par l’Appeal of Conscience Foundation.


Discours lors de la cérémonie de remise du prix... par elysee

Texte du discours

Cher Rabbin Schneier,

Je vous remercie d’abord pour votre invitation et je salue l’engagement de votre vie, que vous avez consacrée au dialogue entre les religions, entre les cultures, entre les civilisations et donc pour la paix. C’est pourquoi c’est un honneur que d’être ici parmi vous, au milieu d’amis venant du monde entier, d’Australie, du Mexique, des États-Unis et de la France.

Docteur Henry Kissinger, depuis que je m’intéresse à la politique, c’est-à-dire depuis longtemps, vous êtes une référence. Adolescent je suivais vos initiatives pour la paix au Vietnam et pour trouver une solution. C’était ce que l’on appelait les Accords de Paris. Vous connaissez bien mon pays et vous êtes un ami de la France. Et encore ce soir vous nous livrez une leçon de relations internationales gratuitement ou presque. Je veux vous remercier pour la profondeur de vos analyses, pour la hauteur de vue, il est précieux d’avoir des personnes de grande expérience comme vous pour éclairer la suite du chemin.

Je suis sensible à la présence et aux prix qui ont été remis à Carlos Slim et Andrew Liveris, qui par leur propre action au sein de leur compagnie, ont voulu aller au-delà des résultats de leur société pour s’occuper de la société, c’est-à-dire de l’intérêt général.

Je suis donc très sensible à l’hommage que vous rendez à l’action que j’ai pu conduire à la tête de mon pays depuis plus de quatre ans, à travers les décisions que j’ai dû prendre, les épreuves que j’ai traversées et si je devais retenir une seule de ces décisions et un seul de ces défis, c’est sans doute le mois de novembre dernier où la France a été frappée par des attaques terroristes à Paris, à St Denis, et où se tenait quelques jours après une conférence sur le climat qui paraissait difficile à tenir dans ce contexte et dont l’issue positive était tout sauf assurée.

Je veux ici reconnaitre que la solidarité internationale à l’égard de la France a été telle que tous les chefs d’États et de gouvernements de la planète se sont retrouvés à Paris pour cette Conférence sur le climat. Conscients de ce qu’était leur responsabilité, alors même qu’ils avaient pu échouer quelques années plus tôt, ils ont signé un Accord historique sur le climat dont il nous appartient aujourd’hui d’assurer la ratification par tous les États, mais surtout la mise en œuvre. Voilà ce qui m’amène à la conclusion que je veux tirer devant vous, c’est que face à un problème qui parait le plus immense, celui de l’avenir de la planète, il est possible que des femmes et que des hommes d’État réussissent à trouver une issue.

Donc rien n’est inaccessible à la communauté internationale dès lors qu’elle prend ses responsabilités. Mais en revanche, si elle se dérobe, si elle s’écarte de ses devoirs, si elle manque à ses responsabilités, alors les risques de guerre, de conflit, sont de nouveau devant nous.

Mais au-delà de ma personne, en remettant ce prix, vous honorez la France. La France, inspirante, celle qui défend partout la liberté, la démocratie, les droits de l’Homme. La France souffrante, celle qui a été attaquée par les terroristes, parce qu’elle incarne un mode de vie, une culture, une idée, une idée qui appartient à la France et au monde : l’idée du progrès et de la liberté.

Cette idée-là, ici, en Amérique, on la connait, on l’a partagée, à travers nos révolutions et ce sont les mêmes raisons pour lesquelles les États-Unis sont également frappés par le terrorisme, encore ces derniers jours, comme vous l’avez rappelé. Mais j’ai surtout à l’esprit le souvenir des attentats du 11 septembre 2001 et je tiens en cet instant à rendre une nouvelle fois hommage aux victimes de ces attaques. C’était il y a 15 ans : On that day, we were all Americans, but today you are all French because you are the threat is terrorism.

Mais le terrorisme frappe tant de pays, tant de continents, aucun n’en est à la l’abri, et c’est pourquoi nous sommes bien plus qu’Américains, bien plus que Français, nous sommes le monde responsable de la planète. Le prix que vous remettez salue aussi la France dans ce qu’elle a de plus élevé, c’est-à-dire l’égalité entre ses citoyens, quels que soient la couleur de la peau, les parcours, les religions, les convictions. Nous sommes tous égaux, c’est ce qui est inscrit dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, que les hommes et les femmes naissent libres et égaux en droits.

Voilà la France : un pays qui est capable au lendemain de l’assassinat effroyable d’un prêtre à la fin du mois de juillet, dans une commune de France, Saint-Etienne-du-Rouvray, de rassembler des chrétiens, des musulmans et des juifs dans une église. J’étais fier de la France ce jour-là même si j’étais malheureux, accablé par l’assassinat de ce prêtre. Et comme vous venez de le dire, cher Rabbin Schneier, les crimes prétendument commis au nom d’une religion sont des crimes contre la religion.

La liberté de conscience est une liberté fondamentale et la France garantit cette liberté au nom d’une valeur que l’on nomme « laïcité ». Je sais les interrogations que suscite parfois cette notion de « laïcité » au-delà des frontières de la France.

Alors, je veux être clair, la laïcité, c’est la séparation des Églises et de l’État avec en contrepartie sa neutralité, c’est-à-dire le respect de tous. La laïcité c’est le droit pour chacune, chacun de pratiquer personnellement le culte de son choix et c’est cette liberté que la France garantit.

Ce qui nous réunit, Mesdames et Messieurs ce soir - au-delà des prix qui sont remis - c’est l’appel de la conscience. La conscience, c’est à la fois une exigence de lucidité que l’on attend des responsables publics et un principe d’action que l’on exige des hommes et des femmes qui gèrent les états du monde.

La conscience se nourrit de la mémoire. L’été dernier, j’étais à Auschwitz pour le 70ème anniversaire de la libération des camps. J’ai rencontré les survivants. Un attentat venait de viser les juifs de France et j’ai vu dans leurs yeux la crainte d’une effroyable répétition. Je me suis souvenu alors des mots du regretté Elie Wiesel qui disait que « l’antisémitisme est une lèpre qui revient insidieusement quand les civilisations croyaient s’en être à jamais débarrassé ». L’antisémitisme est revenu aujourd’hui, alimenté toujours par les vieux préjugés de l’extrême droite, mais aussi par l’islamisme radical. C’est pourquoi le gouvernement français a pris toutes les mesures pour le combattre sans répit et sans faiblesse.

Depuis un an, le nombre des actes antisémites a diminué mais s’il n’en restait qu’un ce serait toujours un de trop. C’est pourquoi la détermination de la France à combattre l’antisémitisme, au même titre que toutes les formes de haine, à l’égard de toutes les religions, est et restera totale.

Le XXème siècle nous a appris que les démocraties peuvent triompher de tous les périls à la condition de rester fidèles à leurs valeurs. Ce sont toujours les démocraties qui gagnent les guerres. Contre le nazisme, contre les totalitarismes, contre les dictatures. Cette loi de l’histoire demeurera au XXIème siècle.

C’est vrai que le monde a considérablement changé et ceux qui prédisaient lors de la chute du mur de Berlin la fin de l’histoire se sont lourdement trompés. Ils annonçaient un monde global dont le seul destin était le développement des échanges, la circulation des informations, la production des richesses. Ils pensaient que la paix était pour toujours installée sur la planète. C’était une illusion.

A la guerre froide ont succédé des conflits brûlants, des frontières ont craqué sous la pression des nationalismes, des régions entières sont déstabilisées. Certes, des dictatures sont tombées, mais elles ont laissé place à des chaos indescriptibles. L’extrémisme religieux a resurgi, le terrorisme islamiste s’est répandu notamment en Afrique, au Moyen-Orient.

Nous voyons des choses, nous revoyons des choses effroyables. Des armes chimiques employées en Syrie, des millions de réfugiés qui fuient la guerre, des minorités religieuses qui sont massacrées, des monuments inscrits au patrimoine de l’Humanité qui sont détruits.

Et voilà qu’en plus de ces menaces, de ces peurs, de ces crimes, de ces horreurs, de cette barbarie, voilà que les populismes resurgissent.

Je suis né au milieu des années 50. Je suis d’une génération pour laquelle la démocratie était la chose la plus sûre, la plus définitivement acquis. Je pensais que les principes de la sécurité collective issus de la Seconde Guerre mondiale étaient irrévocables. Je pensais que la construction européenne représentait pour l’ensemble du monde un exemple et une référence qui ne pourraient jamais être mis en cause, que son destin était de s’élargir, jamais de se rétrécir.

Voilà ce que je pensais tout au long de ces décennies qui ont suivi le milieu des années 50. Et bien ce que je croyais être indestructible est devenu un sujet de débat. Oui, même la démocratie.

Le terrorisme met les démocraties à l’épreuve. Le mal s’est installé au cœur même de nos sociétés. Ce que cherche le terrorisme à détruire, c’est notre cohésion. Ce qu’il cherche à imposer, c’est la division. Voilà pourquoi nous devons être d’une détermination absolue, mais sans jamais perdre notre âme.

Dans le désordre, nous avons besoin d’une boussole si nous voulons agir. Henry Kissinger a écrit que l’analyste, l’expert, peut choisir le problème qu’il souhaite étudier ou régler, alors que les problèmes que doit résoudre l’homme d’État lui sont imposés par la réalité, il ne peut pas les choisir, il doit les trancher.

Cette obligation de prendre une décision avant qu’il ne soit trop tard, je l’ai ressenti quand la France est intervenue au mois de janvier 2013 au Mali pour préserver la souveraineté et l’intégrité de ce pays ami et éviter que les fondamentalistes occupent un territoire et déstabilisent l’ensemble de l’Afrique de l’Ouest.

C’est au nom de ce principe d’urgence que la France est également intervenue en Centrafrique pour éviter des massacres.

En Syrie, je constate que l’inaction coupable de la communauté internationale a produit un désastre : 400 000 morts. La France, quand elle a su que des armes chimiques avaient été utilisées, était décidée à prendre ses responsabilités. Et encore aujourd’hui, j’appellerai devant les Nations Unies, à ce que nous puissions trouver de nouveau les conditions d’une trêve, permettre l’accès humanitaire et mettre en place une transition politique.

Un jour, il nous sera reproché de ne pas avoir agi suffisamment en Syrie, de ne pas avoir fait cesser la tragédie d’Alep. Alep est une ville symbole, une ville martyre, comme nous en avons connues d’autres, en Bosnie ou ailleurs.

Face à d’autres crises, il faut agir. C’est ce que nous avons fait aussi par rapport à l’Iran, pour rechercher un accord nucléaire. La France y a déposé les conditions que nous avons été capables d’imposer sans jamais renoncer.

De la même façon, je ne me résigne pas à ce que nous ne puissions trouver aucune solution au conflit entre Israéliens et Palestiniens. Là aussi un chemin pour la paix est possible. C’est Shimon Peres, pour lequel j’ai une pensée en ce moment, qui m’indiquait qu’il avait toujours cet espoir.

Le pire est de se résigner, de considérer qu’il y a toujours des crises plus graves ailleurs, que ce n’est pas le moment d’agir.

Or, si nous ne réglons pas les problèmes aujourd’hui, ils reviennent demain encore plus lourds, encore plus intenses.

C’est aussi la raison pour laquelle avec la chancelière Angela Merkel, nous avons voulu trouver un chemin pour que l’Ukraine puisse être aussi protégée d’agressions et faire en sorte de pouvoir déterminer son destin. À l’occasion du 70ème anniversaire du débarquement, le format Normandie nous a permis de faire signer les accords de Minsk. Nous poursuivrons tous nos efforts pour que ces accords soient mis en œuvre.

Voilà, Mesdames et Messieurs ce que j’étais venu vous dire. Le monde, en ce XXIème siècle, est menacé par des guerres, des conflits, le terrorisme, le dérèglement climatique, la misère, les migrations, les réfugiés. Voilà notre monde, même si dans beaucoup de régions nous connaissons, avec la mondialisation, une prospérité qui n’était jusqu’à présent qu’un rêve, une chimère. C’est le contraste entre un monde de déséquilibres et un monde de croissance.

Alors, face à ces réalités, le seul enjeu c’est l’unité de la communauté internationale, c’est l’unité même des continents, l’unité des Nations.

Si nous nous laissons aller à nos divisions, à nos peurs, c’est à ce moment-là qu’il existe le risque de l’affrontement. Ce risque est là. Ça sera un choix pour toutes les sociétés, de savoir comment elles veulent vivre, de savoir s’il est possible d’être ensemble, si nous pouvons accepter les apports des uns et des autres pour former une nation, un continent, un monde.

Vous, vous avez pris vos responsabilités d’une autre façon, vous cherchez l’unité d’une autre manière. Votre fondation est interconfessionnelle, elle promeut le dialogue entre toutes les religions, et vous y êtes très attachés. Vous avez, vous-même, cher Arthur Schneier, invité le Pape. Moi je suis allé le voir. Vous avez été capable de faire prier le Pape dans votre synagogue. Lui, il a prié pour la France quand elle a été victime de ce crime barbare dans une église et il a appelé aussi au dialogue entre les religions.

Il y a quelques jours, le Roi du Maroc a aussi appelé les musulmans, les juifs et les chrétiens à établir un front commun contre le fanatisme et le repli sur soi. La France, je l’ai dit, est un pays laïc, mais qui considère que les religions ont leur place et peuvent jouer leur rôle dès lors qu’elles ne s’immiscent pas dans les décisions de l’État.

Notre victoire sur la haine sera politique et militaire, mais elle sera aussi morale et spirituelle. Voilà pourquoi, je suis moi-même si attaché au dialogue entre les cultures et les civilisations, non pour les confondre mais pour les unir, pour poursuivre le combat pour le progrès de l’Humanité. Si on cherchait ce qui fait une femme ou un homme d’État, c’est finalement de savoir prendre les décisions utiles pour son pays, pour la planète.

Si un jour j’ai à rendre compte, et j’aurai forcément à rendre compte, au-delà de vous et par-delà même des échéances, c’est de savoir si j’ai pu prendre des décisions utiles à mon pays et au monde, c’est-à-dire capable non seulement de préserver le présent mais de préparer l’avenir.

Merci pour votre prix.

Programme prévisionnel

Lundi 19 septembre

19h00

Cérémonie de remise au Président de la République du prix « Homme d’État de l’année » de la fondation inter-confessionnelle américaine « Appeal of conscience », par Arthur Schneier, son fondateur.

Dîner suivi d’une allocution du Président de la République

Mardi 20 septembre

8h15

Entretien avec Riyad Hijab, Coordinateur du Haut-Comité de l’opposition syrienne, et Anas Al Abdah, Président de la Coalition nationale syrienne

9h00

Entretien avec Tammam Salam, Président du Conseil des ministres libanais

9h45

Entretien avec le Général Abdel Fattah Al-Sissi, Président de la République arabe d’Égypte

10h00

Entretien avec Muhammadu Buhari, Président de la République fédérale du Nigeria

Vers 11h00

Discours du Président de la République devant l’Assemblée générale des Nations Unies

13h20

Réunion sur les énergies renouvelables en Afrique

14h00

Entretien avec Shinzo Abe, Premier Ministre du Japon

14h30

Entretien avec Juan Manuel Santos, Président de la République de Colombie

15h15

Entretien le Prince héritier Mohammed Bin Nayef Bin Abdulaziz Al Saoud, ministre de l’Intérieur du Royaume d’Arabie saoudite

16h00

Entretien avec M. Haïdar Al-Abadi, Premier ministre de la République d’Irak

16h35

Remise conjointe du rapport sur la santé et la croissance économique par le Président de la République et Jacob Zuma, Président de la République d’Afrique du Sud, à Ban Ki-Moon, Secrétaire général de l’ONU

17h00

Sommet sur la crise des réfugiés organisé par le Président Barack Obama

18h10

5ème anniversaire du Partenariat pour un Gouvernement ouvert

19h00

Evénement consacré au patrimoine culturel mondial menacé au Metropolitan Museum

20h00

Entretien avec Bill Clinton, Président de la Fondation Clinton

20h45

Présentation du film « Human » de Yann Arthus-Bertrand en avant-première américaine

21h30

Entretien avec Hassan Rohani, Président de la République islamique d’Iran

dernière modification le 23/09/2016

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